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Scolies
13 juin 2012

CCLI

Cognitio primi generis unica est falsitatis causa, secundi autem, et tertii est neccessario vera.*

– Spinoza


Nous sommes informés de tout et nous ne savons rien. Savoir doit être pris ici dans son sens fort, qui correspond au second ou troisième genre de connaissance chez Spinoza, par opposition au savoir de sens faible, à la connaissance du premier genre, venant d'ailleurs que de soi-même, par ouï-dire. Nous croyons maîtriser certaines thèses et certaines distinctions conceptuelles, mais dès que nous faisons l'effort de creuser ces idées, nous nous aperçevons que nous n'avions qu'une connaissance superficielle de ces choses. On nous a gavé de formules et de recettes magiques ; nous les avons appliquées aux problèmes artificiels que nos maîtres nous ont posé ; mais presque jamais on nous a conduit jusqu'à la connaissance véritable, profonde, qui inclut la genèse de l'idée, son développement et sa démonstration. Ainsi nous apprenons sans comprendre ; notre savoir est faible, cantonné à l'incertitude du premier genre ; il suffit d'un rien pour l'ébranler.

Il est vrai que la spécialisation des scientifiques nous contraint à nous limiter à ce premier genre de connaissance, car il ne suffirait pas de toute une vie pour comprendre véritablement, c'est-à-dire en faisant le difficile chemin par soi-même, la somme des savoirs de toutes les sciences réunies. Il vaut mieux être informé que la terre autour du soleil que de l'ignorer, même si à peu près aucun de nous ne sait, à proprement parler, pourquoi la terre autour du soleil. La révolution copernicienne peut être vaguement comprise par tout un chacun, mais le savoir véritable ne tolère point cette confusion, ce vague, cet à peu-près dans la conception de l'idée ; au contraire, sa vérité éclate, s'impose en une précision sans faille, en un jaillissement irréfutable. Il en va ainsi des propositions mathématiques les plus faciles ; pourquoi en serait-il autrement des théories les plus complexes ? Seulement, nous n'avons pas le temps, ni les moyens, de faire le chemin par nous-mêmes, et nous devons nous contenter d'être informé du résultat des dernières recherches entreprises. Au fond, cela n'est pas si dramatique du moment que l'on s'efforce de bien faire la différence entre le véritable savoir, du second et troisième genre de connaissance, et le savoir faible, bêtement efficace, du premier genre de connaissance. Par là, la présomption est évitée, ce qui est déjà beaucoup.

*La connaissance du premier genre est l'unique cause de fausseté, et celle du deuxième et du troisième est nécessairement vraie.

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