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Scolies
8 août 2012

CCCVII

— Ça sert à quoi, le Glaude, ce que vous faites avec cette fumée ?

— À rien...

— À rien ?

— À rien d'autre que d'être bien après une bonne assiette de soupe. Voilà à quoi ça sert, et c'est déjà pas mal. Y en a qui disent que ça vaut rien pour la santé. Mais, sur la terre, tout ce qu'est extra paraît que c'est nuisible, depuis quelque temps.

– René Fallet

soupe2

J'ai souvent croisé des personnes sincèrement interloqués devant des personnes qui, manifestement, ne fumaient pas par dépendance. De même, me voyant fumer, certaines de mes connaissances se sont candidement demandées ce qui pouvait expliquer un choix aussi surprenant, comme si le plaisir était une notion par eux incomprise. Contrairement à la Vieille Denrée, les hommes, en général, comprennent assez bien l'intérêt du plaisir, ou, pour le dire autrement, la joie que prodigue des gestes n'augmentant ni le capital financier ni le capital de la vie. Mais voilà ! La santé est devenue, dans notre faiblarde société hygiéniste, un capital comme un autre. Il en résulte un changement de priorité : ce qui n'est qu'un moyen de préserver sa vie a désormais davantage d'importance que la vie elle-même ; la peur de mourir d'un cancer quelconque est désormais bien plus importante que le bonheur donné par le vin et le tabac. Heureusement que l'amitié n'est pas dangereuse, sans quoi le gouvernement mettrait toute la propagande possible en oeuvre pour nous dissuader de lier des relations trop proches, trop intenses, avec d'autres êtres que nous. Drôle de société que la nôtre, tout de même, dans laquelle la jonction du dogme de l'expansion économique et de la santé à tout prix ont corrompu la notion simple du plaisir ! Je vois beaucoup de confusion autour de la doctrine hédoniste. Aujourd'hui, il faudrait affirmer un hédonisme fort, capable d'envoyer allègrement ballader tous les tristes scrupules hygiénistes, tout en développant, avec suffisamment de précision, un discours assez clair pour distinguer les faux plaisirs des vrais dans le cadre de notre société contemporaine. Pas toujours facile d'être un bon vivant en 2012 ! 

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