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Scolies
17 avril 2013

CCCXVI

Le courage de la vérité, la foi en la puissance de l’esprit sont la première condition de l’étude philosophique ; l’homme doit s’honorer lui-même et s’estimer digne de ce qu’il y a de plus élevé. De la grandeur et de la puissance de l’esprit il ne peut avoir une trop grande opinion. L’essence fermée de l’univers n’a en elle aucune force qui pourrait résister au courage de connaître, elle doit nécessairement s’ouvrir devant lui et mettre sous ses yeux ainsi qu’offrir à sa jouissance sa richesse et ses profondeurs.

– Hegel

Pour atteindre l'excellence dans une activité, quelle qu'elle soit, il faut la foi. Ainsi le sportif qui décide de courir trois fois par semaine pendant une heure doit avoir la foi dans les vertus de cette activité, sans quoi il se lassera vite et arrêtera bientôt de dépenser ses forces. Ceux qui commencent une activité quelconque sans cette foi, et ils sont nombreux, finissent par arrêter en gémissant que ce n'était pas fait pour eux. Voilà comment la velléité triomphe de la volonté. Tout ceci devient parfaitement clair lorsqu'on saisit qu'il y a un lien intime entre la volonté et la foi. Pour vouloir vraiment faire quelque chose, il faut le vouloir de toute son âme, c'est-à-dire avoir la foi. Tous les grands sportifs ont foi en leur sport ; tous les grands artistes ont foi en leur art ; et tous les authentiques philosophes en foi en l'esprit. Cette foi n'est pas un simple agrément, un petit plus, un simple tonalisant ; c'est la première condition de l'exercice de l'activité. 

La foi ne se confond pas avec la croyance fausse ou le préjugé, comme le suggère souvent le matérialisme vulgaire qui crie au scandale dès qu'il entend un mot aux connotations religieuses. La foi, c'est une volonté de croire, qui se moque des preuves, qui va contre les preuves, et qui prodigue un élan qui pousse à agir ; autrement dit, la foi est le plus efficace des moteurs, plus puissant que les intérêts ou les passions. Toutes nos grandes actions, celles qui nous rendent fier, trouvent leur source dans une foi ; c'est cette chaleur qui donne sens à nos efforts qui nous rend capable d'être des héros, c'est-à-dire des forces de volonté allant contre l'évidence première de la nécessité extérieure. Pour toutes ces raisons, il n'y a rien de plus édifiant et instructif que la considération d'un champion, quel qu'il soit : sport, morale, science, jeux, il y a dans tous ces domaines des champions qui forcent l'admiration, stimulent, et donnent confiance en nous-mêmes ; ils réveillent notre coeur ; ils donnent envie d'avoir la foi ; ils exaltent notre volonté. On a donc raison de choisir ses héros, pourvu qu'il s'agisse de véritables hommes de volonté, et non de plates idoles qu'on a propulsé par hasard devant tous les regards. 

Nietzsche a tort de se moquer de l'optimisme théorique des philosophes et scientifiques. Toutes les grandes découvertes et les grandes inventions proviennent de cet optimisme. La confiance excessive dans les pouvoirs de la raison a pu égarer plus d'un homme de science ; mais ces erreurs finissent toujours par être rectifiées par d'autres hommes intéressés par la découverte de la vérité. Les sceptiques eux-mêmes servent malgré eux les rationalistes en leur donnant des obstacles, des objections, des limites qu'ils s'empressent allègrement de dépasser par l'effort de la raison. Il est vrai que notre raison a des bornes qu'elle doit éviter de franchir ; je suis kantien et non hégélien ; mais il faut reconnaître que le philosophe doit se mouvoir dans la sphère qui lui est circonscrite en ayant ce courage, cette foi, qui anime l'esprit et qui le conduit à se surpasser toujours lui-même. Sans cette foi, le philosophe piétine avec un esprit desséché, il a des pensées fades, il s'ennuie et ennuie tout ce qui l'entoure. La philosophie rejette par elle-même hors d'elle tous les esprits faibles, qui doutent de l'esprit sans lui avoir au préalable accordé sa confiance. Les mécréants de l'esprit sont condamnés à ne jamais connaître les joies de l'esprit. 

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