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Scolies
13 novembre 2011

XXXVIII

Nous n'avons aucune communication à l'être, parce que toute humaine nature est toujours au milieu entre le naître et le mourir, ne baillant de soi qu'une obscure apparence et ombre, et une incertaine et débile opinion.

Montaigne

martin_heidegger 

J'aimerais susurrer cette phrase à l'oreille de Heidegger. Quand je lis un Heidegger, ou je m'énerve, ou je rigole, ou je ferme brutalement le bouquin. Quand je m'indigne à propos de Sein und Zeit, on me rétorque souvent qu'il faut prendre en compte le "second" Heidegger : c'est ce que j'ai fait, et je trouve le second Heiddeger encore plus comique (ou énervant) que le premier. Ces être-pour-le-machin-truc me gavent. À chaque fois que je lis un néologisme pourri de ce genre, je me dis : « Et pourquoi pas l'être-pour-ta-mère ? ». Sa manie d'inverser les voyelles (je ne sais comment ça se ressent en allemand, peu importe) est insupportable. Existential, historial, temporellité : et certains scandent ces concepts morbides avec ferveur !... Ce type n'a aucune ironie, aucune joie dans l'écriture ; sa moustache et son sourire hypocrites en disent long sur sa philosophie – car il serait trop aisé de s'attaquer à l'homme !... Les heideggeriens, à ce que j'ai pu constater, sont souvent des névrosés ; ils ne se sentent pas à l'aise dans l'existence et en font part à leur entourage, ces braves apôtres heureux de propager le laïus de leur allemand préféré. Lire un philosophe avec lequel on n'est pas en accord est facile ; lire un philosophe que profondément, viscéralement, on n'aime pas, sentiment qui va jusqu'au dégoût, est plus délicat... Heidegger est l'opposé radical de Spinoza, et c'est peut-être pourquoi il n'en parle jamais. Quant à Montaigne, je doute qu'il l'ait seulement lu. La manière dont ce philosophailleur est admiré aujourd'hui, tout comme Derrida, Levinas, Marion et autres charlatans phénoménologues, m'inquiète sur l'état de la philosophie dans notre pays. Ceci dit, je ne dirais pas mieux des analytiques enragés qui s'introduisent progressivement dans les universités du continent. Toutes les écoles de pensée sont nuisibles à l'épanouissement de la pensée libre. Il faut déterrer la Heidegger !

Allez, pour la première fois, je ne résiste pas au plaisir de placer une citation à l'intérieur d'une scolie de citation : « Je viens de lire Gelassenheit de Heidegger. Dès qu'il emploie le langage courant on voit le peu qu'il a à dire. J'ai toujours pensé que le jargon est une mauvaise imposture. Le style triste, genre Maurice Blanchot : pensée insaisissable, prose parfaite et incolore. Sartre réussit à faire du bon Heidegger, mais non pas du bon Céline. La contre-façon est plus aisée en philosophie qu'en littérature. » C'est magistral ; c'est clair ; c'est du Cioran. 

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