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Scolies
3 décembre 2011

LVIII

Il avait le sens du désordre... Il plaignait tout ceux qui l'ont pas... Tout l'ordre est dans les idées ! Dans la matière pas une trace !...

Céline

DSCF1685 

Tout le monde a déjà fait cette expérience banale mais parlante : quand quelqu'un, ce qui est un véritable viol de l'esprit, range, ordonne pour nous notre bureau, notre chambre, notre ordinateur, et avec intelligence, selon un principe logique, nous ne retrouvons plus rien. Rien de plus déplaisant que de voir les livres de notre bibliothèque, n'ayant l'apparence d'aucun ordre, soudainement rangés par ordre alphabétique ; c'est que derrière le désordre objectif se cachait l'ordre véritable, l'ordre subjectif. Ce que la mère en colère appelle bordel en désignant la chambre de son enfant, est ordre presque sacré pour lui. Et si nous appelons nôtre une chambre et une bibliothèque, c'est avant tout parce que nous y avons inséré notre ordre ; nous avons fait notre rangement ; et dire qu'un bureau est nôtre uniquement parce qu'il y est déposé des cahiers avec notre nom inscrit dessus, c'est ne rien comprendre de la possession véritable, qui est toute spirituelle.

Il est toujours curieux de voir les conséquences du primat de l'esprit, du jugement subjectif, sur les choses objectives, lesquelles n'ont presque aucune signification si ont les détache du sujet en liaison avec elles. Faire l'éloge du bordel, c'est chanter un hymne à la puissance ordonnatrice de l'esprit. Il faut néanmoins préciser que s'il est tout à fait respectable et même souhaitable d'avoir un ordre subjectif qui ne coïncide pas avec l'ordre rationnel et de bon sens, fondé sur des conventions et des principes utiles, cela ne peut qu'être vrai pour ce qui nous concerne nous, et nous seuls ; il est tout à fait légitime d'éprouver un fort sentiment de mécontentement et d'indignation face à un ensemble d'objets qui ne nous appartiennent pas et qui est censé former un ordre afin qu'une autre personne, ou l'ensemble des citoyens s'il s'agit, par exemple, d'une bibliothèque publique, puisse trouver aisément tel ou tel objet précis – précision nécessaire, car il en est qui, de la vérité se dégageant d'une situation précise, en infère des conséquences sur une situation qui ne serait dérivée qu'en apparence, alors qu'elle en diffère évidemment du tout au tout. Bref, belle leçon que celle de l'inoubliable et magnifique et délirant Roger-Marin Courtial des Péreires (et quel nom ! quel nom !) : tout l'ordre est dans les idées, respectons le désordre des autres, et, enfin, vive notre bordel à nous, rien qu'à nous !

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