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Scolies
25 mars 2012

CLXXI

Qu'on donne un esprit de pédanterie à une nation naturellement gaie, l'État n'y gagnera rien, ni pour le dedans, ni pour le dehors. Laissez-lui faire les choses frivoles sérieusement, et gaiement les choses sérieuses.

– Montesquieu

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Les chinois à Paris, oeuvre incomprise du sous-estimé Jean Yanne, semble être une illustration du cinquième chapitre du livre XIX de L'esprit des lois, court et parfait texte ciselé à la Montesquieu où ce dernier s'efforce de montrer, avec l'exemple de la France, combien il faut être attentif à ne point changer l'esprit général d'une nation. Ainsi, les Chintoks auront beau essayer, par tous les moyens imaginables, de faire du peuple français de zélés communistes fidèles à l'héritage marxiste et léniniste, de leur faire apprécier l'austérité, le sérieux, et l'hygiène chinois, jamais les Gaulois ne se débarrasseront de leur inaltérable esprit frivole, joyeux, paillard, agressif, cynique. Les Français seront toujours médiocres si on leur demande d'être policé à la manière d'un autre peuple et de produire en masse des tuyaux de fumisterie ; mais demandez-leur, comme se résignent à le faire les Chintoks sous l'influence du génial opportuniste interprété par Jean Yanne, de jouer le rôle des hilotes de l'empire communiste en montrant ce qu'est la gaieté de la galanterie et du libertinage, le bonheur de l'amour excessif pour la chair fraîche des femmes et le soucis pris au devoir de régulièrement faire bonne chère, demandez-leur tout cela, et ils seront, de ce point de vue, le meilleur peuple de la terre.

J'aime à voir, dans un bijou de Jean Yanne, le petit chintok chialer devant l'exigent bonheur français, disant, vaincu, à ses supérieurs, que lui et son peuple ne peuvent pas rivaliser avec les français qui sont habitués, depuis des siècles, à bouffer, picoler, et niquer. J'aime à voir, dans La grande illusion, les prisonniers de guerre français faire joyeusement bombance avec des mets de qualité, tandis que les Allemands mangent péniblement du chou. J'aime à écouter l'hymne royaliste célébrant Henri IV, roi vaillant ayant le triple talent de boire, de battre, et d'être un ver galant ; et moi aussi je veux, comme mes pères, avec de bon amis, chanter au choc des verres, des roses et des lys. J'aime à lire Rabelais et Beaumarchais ; j'aime à admirer les Indes Galantes et les opéras d'Offenbach ; j'aime à découvrir la légèreté philosophique de Diderot et Clément Rosset. Et j'aime recopier et relire avec délectation le subtil Montesquieu : Qu'on nous laisse comme nous sommes, disait un gentilhomme d'une nation qui ressemble beaucoup à celle dont nous venons de donner une idée. La nature répare tout. Elle nous a donné une vivacité capable d'offenser, et propre à nous faire manquer à tous les égards ; cette même vivacité est corrigée par la politesse qu'elle nous procure, en nous inspiront du goût pour le monde, et surtout pour le commerce des femmes. Qu'on laisse tels que nous sommes. Nos qualités indiscrètes, jointes à notre peu de malice, font que les lois qui gêneraient l'humeur sociable parmi nous ne seraient point convenables.

 

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